GORDION
L'ancienne
Gordion, de nos jours dans le village de Yassıhöyük,
se situe à 100 km à l'ouest d'Ankara, près
du point de confluence des rivières Sakarya
(antique Sangorios) et Porsuk. Les origines
de Gordion remontent à l'âge
du bronze. De cité hittite,
elle devint la capitale du Royaume
de Phrygie. La cité atteint son apogée
entre 725 et 696 av. J.C. sous le règne du
roi Midas. Deux récits mythologiques ont tendance
à nous faire oublier que Midas fut un vrai
et important roi. D'après la première légende,
Midas porta secours à Silène, le compagnon
et précepteur de Dionysos, alors qu'il était
complètement ivre et s'occupa de lui. Pour
l'en remercier Dionysos invita Midas à formuler
un voeu. L'insensé Midas lui demanda d'avoir
le pouvoir de changer en or ce qu'il toucherait.
Hélas, tout ce qu'il touchait, sans exception,
se transformait en or. Riche mais rendu incapable
de manger ou de boire, il demanda à Dionysos
de le pardonner et de lui reprendre cette
funeste faveur. Le dieu lui conseilla de se
laver dans la source du Pactole
qui se mit à rouler de l'or. D'après la deuxième
légende, Midas, en tant que juge lors d'un
concours musical, ayant préféré la flûte du
satyre Marsyas à la lyre d'Apollon, fut puni
par le dieu de la musique qui lui fit pousser
des oreilles d'âne. Quand à Marsyas il fut
écorché vif. Midas pour cacher sa disgrâce
se mit à porter un bonnet* conique,
mais il ne put cacher son état à son barbier
qu'il menaça de mort s'il parlait. Le poids
de son mutisme pesa tellement à ce dernier
qu'il finit par creuser un trou au bord de
la rivière, pour y enterrer son secret. Mais
à cet endroit poussèrent des roseaux qui,
au moindre souffle du vent, répétaient "
le roi Midas a des oreilles d'âne " !
Il est vraisemblable que la destruction de
Gordion par les Cimmériens ait poussé le roi
Midas à se suicider en 696 av. J.C. . La cité
fut reconstruite sur un tertre plus petit
dit Küçük Höyük, puis passa sous domination
lydienne
puis perse jusqu'à
l'arrivée d' Alexandre le Grand qui
lui rendit son indépendance (mais Gordion
ne fut plus jamais une ville prépondérente
surtout après l'invasion des Galates). C'est
là qu'eut lieu l'épreuve du fameux "noeud
gordien" : d'après la légende, lorsque
leur roi mourut sans laisser d'héritier, les
Phrygiens consultèrent l'Oracle de Delphes
qui leur prédit que leur nouveau roi arriverait
tiré par des boeufs. Un jour, Gordias
et sa femme, des immigrants venus de Macédoine,
arrivèrent en ville dans un char à boeufs.
A sa grande surprise et pour sa plus grande
joie, Gordias fut fait roi. Afin de ne pas
oublier son origine humble et pour montrer
sa gratitude, Gordias offrit au Temple de
Zeus son char dont le joug était relié au
timon par un noeud très compliqué. Lorsque
le roi Midas, qui était le fils de Gordias,
mourut sans laisser d'héritier, un nouveau
problème de succession s'ensuivit. L'Oracle
prédit que celui qui réussirait à défaire
le fameux noeud règnerait sur toute l'Asie.
De nouveaux souverains se succédèrent mais
le noeud resta intact. Trois siècles plus
tard, durant sa campagne contre les Perses
et alors qu'il passait l'hiver à Gordion,
Alexandre
le Grand résolu le problème en...tranchant
le noeud avec son épée ! (d'où l'expression
couper le noeud gordien qui signifie résoudre
un problème difficile).
* Le bonnet phrygien, une coiffure
conique qui s'ajuste bien autour de la tête
et qui est caractérisée par sa pointe recourbée
vers l' avant, a pour origine la Phrygie.
A la période romaine, ce bonnet était porté
par les esclaves affranchis pour montrer qu'ils
étaient libres. Sous le nom de bonnet rouge,
il fut porté par les révolutionnaires français.
Marianne, qui est le surnom de la République
Française, est représentée par un buste de
femme coiffée d'un bonnet phrygien.
Le
site de Gordion a été identifé par les frères
Körte qui dirigèrent les premières fouilles
en 1900. Depuis 1950 l' University of Pennsylvania
Museum of Archaeology and Anthropology
exécute les fouilles du site archéologique
qui est extrêmement vaste. Il est constitué
du Tertre de la Citadelle, du petit
tertre de Küçük Höyük avec une forteresse
et une pan de rempart, de la ville extérieure
s'étendant sur 20 à 30 ha sur la rive opposée
du Sakarya et qui remonte aux VIe - IVe siècles
av. J.C.. Dans la vallée, de part et d'autre
de la rivère se trouvent une centaine de
tumuli de différentes tailles datant du
Ier millénaire av. J.C..
Le Tumulus du Roi Midas, dans lequel se
trouve un long passage d'environ 70 m de long
qui mène à la chambre funéraire protégée par
une double rangée de rondins de bois et des
poutres. Ceci représente la plus ancienne
structure en bois intacte connue. Içi fut
découvert le corps désagrégé du roi Midas,
allongé en grand apparat dans son cercueil
sur une pile d'étoffes de couleurs pourpre
et bleue et entouré de 14 pièces de mobilier
en bois qui étaient les tables utilisées lors
du banquet funèbre avant l'enterrement. Le
banquet avait été " recrée " à l'intérieur
de la tombe par les anciens gardiens qui disposèrent
plus de 150 pièces de vaisselle en métal décrites
comme " le plus important service à boisson
de l' Age du Fer ". Les analyses des
résidus organiques contenus dans cette vaisselle
- les situlae à tête de bélier et à tête de
lion, un récipient, 9 petits et 4 grands bols
- déterminèrent qu'un mélange de vin, bière
d'orge et hydromel avait été servi durant
le banquet funèbre. Des pots contenant les
restes d'un ragoût épicé de mouton ou de chèvre
aux lentilles furent disposés à l'intérieur
des grands chaudrons. Il est possible que
ces restes aient été gardés intentionnellement
comme alimentation du roi dans sa vie future.
Les objets et le mobilier provenant de la
tombe sont exposés au Musée des Civilisations
Anatoliennes à Ankara.
Le Musée situé en face du tumulus
royal, expose les fouilles locales et de la
région, principalement des périodes phrygienne,
hellènistique et romaine, une tombe galate,
des mosaiques phrygiennes qui sont les plus
anciennes mosaiques connues en Anatolie, et
les mosaiques romaines du IIIe siècle. Une
de ces mosaiques représente Alexandre le Grand
à la Bataille
d'Issos.